Etude de cas : la femme enceinte

Afin de compléter notre étude théorique des apports nutritifs et carences éventuelles présents dans le véganisme, nous nous sommes penchés sur l’influence de ce type de régime sur la procréation puis l’allaitement, révélant un risque de sous-nutrition chez les enfants.


En mai 2017, la France apprenait la mort d'un nourrisson ayant uniquement été nourri avec du lait végétal. L'enfant, victime de sous-nutrition, pesait 4,3 kg à 7 mois, poids situé bien en dessous des recommandations de l'Organisation Mondiale de la Santé. Les parents encourent jusqu'à 18 mois de prison pour maltraitance infantile. En effet, ils refusèrent délibérément de nourrir leur enfant avec du lait animal.

 Durant la grossesse, la prise de compléments alimentaires doit être systématique afin de compenser le manque de nutriment causé par un régime végan. En effet, les besoins nutritionnels sont d'autant plus élevés, ce qui implique une grande prudence de la part de la mère. Afin d'étudier de manière la plus fidèle les nutriments sujets à carences, nous nous sommes appuyés sur les recommandations officielles du ministère de la santé.
Les sources d'information traditionnelles (alimentation et grossesse.com, Bébé Nestlé.com, Parents.fr) déconseillent d'ailleurs fortement la pratique d'un régime végan lors de la grossesse, en raison du risque élevé de carences alimentaires qu'il induit. Selon ces sources, cela mettrait en danger la santé de la mère et du fœtus. Il est toutefois important de remarquer que d'autres sources telles que le site internet Neuf mois ne s'opposent pas au suivi de ce régime lors d'une grossesse, mais conseillent tout de même de varier au maximum son alimentation, et de faire appel à un nutritionniste tout au long de cette période.

Besoins spécifiques théoriques de la femme enceinte

La vitamine B9

L'acide folique est un nutriment essentiel pour le développement du bébé, puisque évitant de nombreuses malformations touchant le système nerveux embryonnaire. Par conséquent une attention toute particulière est recommandée à l'apport en vitamine B9 de toute femme enceinte ayant le projet d'enfanter. Cette vitamine n'est pas particulièrement sujette à carences dans une alimentation végane équilibrée, puisque l'on retrouve cette vitamine dans les produits végétaux tels que, selon Passeport Santé, les légumineuses (de 229 à 368 µg), les épinards (139 µg) ou encore dans les asperges (134 µg). Cette éventuelle carence n'est donc pas spécifique à une population végane, mais doit tout de même être source d'attention.

La vitamine D

Cette vitamine est également essentielle durant la grossesse, puisque permettant la minéralisation du squelette fœtal, et l'absorption du calcium du lait de la mère. Elle fonctionne donc de concert avec le calcium.

 Il faut que chaque femme enceinte végane fasse attention à son taux de vitamine D, puisque celle-ci sera plus sujette à subir une hypovitaminose. Le ministère de la Santé recommande la supplémentation des nourrissons à une dose de 1000 UI par jour après la naissance.

Le calcium

Le calcium est un métal permettant d'aider à la construction du squelette et des dents du fœtus. De plus, il aide la femme enceinte à éviter l'hypertension artérielle. Il est majoritairement présent dans les produits laitiers (un yaourt équivaut en moyenne à 150 mg de calcium), cependant on le trouve également dans les eaux minérales telles que Hépar (1L = 549 mg) , dans les légumineuses ou encore dans les fruits secs (240 mg de calcium pour 100g d'amandes). Une femme enceinte végane peut par conséquent se passer de produits d'origine animale, mais doit prêter attention à l'équilibre de son régime alimentaire, et à éviter les aliments à base de soja, phyto-œstrogènes (cf : Les yaourts et laits végétaux, une fausse bonne idée).

Le fer

Le fer est un minéral essentiel durant la grossesse, puisqu'il permet de transporter l'oxygène dans le sang vers tous les tissus en construction. L'anémie, c'est-à-dire le manque de fer, est plus fréquent chez les populations végétariennes, selon une étude officielle canadienne. Il convient donc à une femme enceinte végane d'être extrêmement vigilante à l'égard de son taux de fer dans le sang. Certains aliments issus des végétaux contiennent suffisamment de fer, comme les légumineuses (5 à 8 mg pour 250 ml d'haricots blancs ou lentilles). La consommation de vitamines C et de protéines permet d'améliorer le taux d'absorption du fer non héminique (cf : Apports nutritifs et carences de l'alimentation végan, mais la femme enceinte végane s'expose tout de même à un risque accru de carences qui n'aurait pas été subi en cas de régime carné. 

La Vitamine B12

Une étude basée sur 10 000 adolescents de l’université de Bristol dont la mère suivait un régime végétariens montre une plus grande tendance de ces personnes à se tourner vers différents types de substances addictives. L'une des hypothèses émanant de cette étude est que ce phénomène est dû à un manque de vitamine B12, agissant directement sur le développement du cerveau. Cette étude permet de se rendre compte de l'importance de cette vitamine durant le développement de l'enfant. 
Habituellement, et comme nous avons pu le constater, le corps est capable de puiser dans ses réserves de vitamine B12 contenues dans le foie, plusieurs années durant. Or, dans le cas de la femme enceinte, les besoins nécessaires au développement du fœtus sont directement puisés à partir de l'alimentation, selon le site VireBittes et vitamine-b12.net. On comprend alors qu'il est essentiel pour toute femme à la fois enceinte et végan de se supplémenter en vitamine B12, afin d'éviter tout déficit

Sources : vitamine-b12.net (recommandations suivant celles de l'OMS/FAO)

Autres dangers rencontrés lors d'une procréation issue d'un régime végan

Le cas du soja

Un exemple de boisson végétale 

à base

 de soja

Les substituts du lait sont majoritairement composés de soja, à l'instar des yaourts de soja que nous avons comparé dans la partie concernant le mental et l'environnement. Or, cet aliment contient des phyto-œstrogènes, (voir fiche technique), ce qui est susceptible d'après une étude sur les animaux, de perturber le développement des organes génitaux du fœtus. En effet, ces substances traversent la barrière placentaire, ce qui incite les femmes enceintes à garder prudence face aux substituts à base de soja (cf partie Nutriments et carences de l'alimentation végan). Afin de combler son besoin en calcium, la femme enceinte devra donc consommer d'autres substituts que ceux produits à partir de soja.

Le lait végétal

Puisque la consommation de lait animal est bannie dans l'alimentation végan, la consommation de substituts chez le nourrisson paraît obligatoire. Pourtant, l'ANSES, agence nationale de sécurité sanitaire, interdit l'utilisation de ces boissons végétales, en indiquant "qu'elles ne peuvent se substituer au lait maternel et/ou aux laits infantiles 1er et 2ème âge, cette pratique pouvant être à l’origine d’accidents graves". Nous nous rappelons de la mort du nourrisson belge en 2017, à cause de la sous-nutrition qu'il avait subi en ayant uniquement été nourri au lait végétal, mais alors, pourquoi la consommation de substituts chez le nourrisson est elle si problématique ? Tout simplement parce que ceux ci ne contiennent pas suffisamment de nutriments. L’expertise collective réalisée par le comité d’experts spécialisé (CES) « Nutrition humaine » a à cet effet analysé les données nutritionnelles de ces produits, et a constaté qu'ils ne répondaient pas aux seuils réglementaires de nutrition du nourrisson. Ainsi toute femme pratiquant un régime végan ne doit en aucun cas remplacer son lait et/ou son lait infantile par des boissons végétales.

Quand bien même une mère voudrait donner du lait infantile d'origine végétale, elle doit, toujours selon l'ANSES, impérativement prendre rendez-vous avec son médecin afin d'évaluer tous les risques éventuels.

Les nanoparticules

L'étude des différents compléments alimentaires (cf : Etude de femmes véganes ayant procréé, Apports nutritifs et carences de l'alimentation végan [Vitamine B12]), nous a fait prendre conscience de la grande présence de nanoparticules dans les compléments alimentaires. Mais alors quels sont leurs dangers ? 

Un article du Monde relate de leurs dangers, notamment du dioxyde de titane, un additif alimentaire très courant dans les compléments alimentaires. On apprend alors qu'une étude des chercheurs de l'INRA a mis en évidence que ces nanoparticules franchissent la barrière intestinale. Les molécules ont alors « un effet initiateur et promoteur des stades précoces de la cancérogénèse colorectale ». 

Si ces molécules peuvent traverser la barrière intestinale, il est alors possible qu'elles traversent le placenta, comme l'indiquent FranceSoir et l'INRA. 

Les dégâts sont alors perceptibles sur les populations de lapins : les lapereaux naissent avec une réduction de l'ordre de 4% de la taille de la tête, et possèdent parfois un tour de taille plus petit. On remarque ainsi une similitude entre les effets constatés chez les humains et les lapins, comme le constate Pascale Chavatte-Palmer, chercheuse à l'INRA.
Il s'agit ainsi d'une autre précaution à prendre de la part des femmes enceintes pratiquant un régime de type végétalien. Elle doit par conséquent veiller à ne pas consommer par précaution des compléments alimentaires contenant des nanoparticules, afin d'éviter tout dommage à son nourrisson.

Étude des femmes véganes ayant procréé 

Certaines femmes de la communauté végane prennent le risque de pratiquer une grossesse tout en étant végétaliennes. Ainsi, nous avons retrouvé les témoignages de femmes ayant vécu une ou des grossesses "à risque", afin de suivre leur quotidien et d'observer éventuellement leur assujettissement à des problèmes particuliers. 
(enfantvege.canalblog.com (cas 1), enfantvege.canalblog.com (cas 2), Arnelae.com, vegephobia.com, Vegetarismus.ch).

La prise de compléments alimentaires

La prise de compléments alimentaires est systématique dans le cas de Sophie, auteure du blog enfantvege.canalblog.com et dans le cas de la mère du site mamanvégane. Sophie nous indique alterner entre le  Vegan Prenatal Multivitamin and Mineral de Deva et la Veg1 de la Vegan Society, tandis que le site mamanvégane nous indique prendre le cocktail de vitamines suivant : 

• Prenatal Nutrients de Solgar
• Prenatal One de Rainbow light
• Vegan Prenatal de Deva 
• Prenatal Multi de Garden Life
• Veg1 de la Vegan Society
• Vegfit de Vegetology. 

Nous analysons donc dans le tableau ci dessous quels sont les composants sujets à problèmes de ces suppléments pris durant toute la grossesse.

Sources : Wikipédia, additifs-alimentaires.net, CDC, Le Monde

Nous remarquons donc que la moitié des compléments alimentaires utilisés sont susceptibles d'affecter le développement du fœtus. De plus, l'utilité de ces compléments reste contestée (cf : Carences constatées).

De plus une étude menée sur 40 000 femmes en 2011 révèle que les produits multivitaminés contenant de la vitamine B6, de l'acide folique et du fer augmenteraient jusqu'à 18% les risques de fausse couche, à contrebalancer avec la prise de compléments bénéfiques comme la vitamine B9 ou la vitamine D durant la grossesse, pour lesquelles les études se croisent pour montrer l’efficacité de la supplémentation. 

Grande prudence à assurer donc face à ces produits. Pour finir, nous retiendrons le conseil de l'INPES qui déconseille la prise de compléments alimentaires en plus de ceux prescrits par le médecin traitant, puisque ceux-ci peuvent conduire à un danger pour le fœtus.  

Carences constatées

Les grossesses de femmes végan sont plus susceptibles d'être sujettes à carences que les grossesses classiques, comme nous avons pu le constater. Et nous le constatons bien sur certains cas étudiés de femmes ayant procréé.

La vitamine B12

On constate deux cas de carences en vitamine B12 sur le site Arnelae. La première femme, sous le pseudonyme d'Arnelae, nous décrit des douleurs ressenties lorsqu'elle tourne la tête, marche, conduit, nage. De plus, elle ressent des vagues de mal-être et ne parvient à ressentir les réflexes, à l'aide du test pratiqué par son médecin. Dès la prise de compléments alimentaires enrichis en B12, ces symptômes disparaissent. L'autre cas décrit les mêmes symptômes, en plus de perte de mémoire, de mal être, et de fatigue. A l'instar de la première femme, les symptômes disparaissent dès la supplémentation.

La vitamine B9

Le blog mamanvégane.fr relate de deux carences post-natales. La première concerne la vitamine B9, vitamine comme nous l'avions vu essentielle au développement de l'enfant. La mère subit alors une carence sévère, puisque son sang contient 13 nmol par litre, alors que les apports recommandés varient de 75 à 100 nmol par litre. Pourtant, la femme assure avoir ingéré des suppléments de cette vitamine durant toute sa grossesse grâce à la Veg1. Nous pouvons donc émettre un doute quand à l'efficacité de ces suppléments, qui peuvent donc être mal absorbés.

Le fer 

La deuxième carence relatée est une carence ferriprive. La femme indique n'avoir pris aucune précaution de supplémentation, mais cette carence reste tout de même significative d'un régime qui semble difficilement autosuffisant. Il s'agissait dans ce cas également d'une carence sévère en fer, puisque la femme avait un niveau de  6,40µmol/l, alors qu'il devait habituellement être situé entre 9 et 30,4µmol/l.

Conclusion

A travers cette étude de cas, nous nous sommes rendus compte que les carences auparavant présentées comme théoriques d'une alimentation végan peuvent malheureusement s'avérer parfois vraies. Ainsi, une femme enceinte pratiquant le régime végan peut être confrontée à des carences variées, même celle-ci prend soin de les éviter. Outre l'aspect purement nutritionnel qui est problématique, le régime végan pose question vis-à-vis du respect de liberté de penser des enfants qui n'ont pas le choix de leur alimentation et doivent systématiquement se supplémenter en vitamine B12. Le régime végan est donc un régime particulier sur le point de vue nutritionnel, qui doit être étudié en profondeur avant toute pratique. Il peut, surtout dans le cas de la vitamine B12, s'avérer dangereux pour le corps.